Il n’y a rien. J’ouvre les yeux et il n’y a rien. Pas de meubles, pas de fenêtres, pas de murs. Pas de poussière. Personne, évidemment. Pas de couleur. Il n’y a que mon corps qui pèse sur le sol dur. Ce sont les deux seules choses concrètes. Ça, et la lumière. Une lumière blanche, éclatante, qui émane de nulle part. Pas de source lumineuse, d’applique, d’ampoule. Pas de plafond, de murs, d’ailleurs, qui pourrait accueillir ces objets. Rien.
Je suis allongée sur le dos. Je ne sais même pas encore que je suis nue. Je tente juste de comprendre où je suis. Comme quand on se réveille, un matin, dans une chambre inconnue et qu’on a ce moment de trouble, qu’on ne sait plus si l’on est chez soi, chez ses parents, dans un hôtel ou chez des amis. C’est la même chose, mais c’est beaucoup plus vertigineux. Il n’y a rien.
Je tente d’être rationnelle, comme on est tenté de l’être quand tout nous échappe. Je me dis « pince-toi, tu rêves ». Mais je n’ai même pas la force de soulever ma main, pour l’instant. Je suis sur le dos, mes bras le long du corps. Je parviens à crisper un peu mes doigts sur le sol. C’est la seule chose tangible. Je caresse, je palpe et je fais appel à ma mémoire. Quel type de sol, quelle matière ? Du carrelage ? Non, c’est plus chaud et un peu plus…souple, me semble-t-il. Souple, ce n’est pas le mot. Plus…résilient, peut-être. Je me dis que ce doit être un sol plastique. Mais un plastique rigide, pas un balatum ou un de ces faux plancher en vinyle. Je n’ai pas froid et le sol est tiède. Je ferme les yeux.
Je sais maintenant à quoi cela me fait penser : aux transats, le long de la piscine, quand j’étais petite, chez mon oncle. Aux transats blancs, brûlants de soleil, quand je sortais de la piscine, trempée et que je m’affalais dessus, pour me sécher, pour prendre une pause, pour rire en voyant mon cousin faire une bombe en éclaboussant mes tantes et mes cousines, pour prélasser mon jeune corps de gamine, souple et caramélisé par l’été à courir dehors. Les jours heureux. Les jours d’avant.
J’ai fermé les yeux, je sais que je n’aurais pas dû, j’ai sombré à nouveau dans ce sommeil contre lequel je ne peux pas lutter.
Comme dans un rêve, mais si réaliste, soudainement, j’ai à nouveau 10 ans, fière, dans mon premier maillot de bain une pièce, violet et rose, avec plein de cœurs et le B de Barbie sur la poitrine, celui que j’ai eu le droit de choisir, parce qu’en vrai, j’aurais préféré un deux pièces, noir, avec le soutien-gorge triangle, plus sexy, mais que ma mère a dit « non, à l’école tu vas aller à la piscine et tu ne pourras pas mettre ça…D’ailleurs, je ne voudrais pas ! Je serai quitte de te racheter un maillot une pièce ! Prends celui que tu préfères. » Et Barbie, c’est pas mal, quand on a 8 ans, durant ces années-là.

3 commentaires:
Youpiiii une nouvelle histoire
🥳 Youpiiiii une nouvelle histoire
Un nouveau roman à lire c'est super
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