Pages

jeudi 11 juillet 2024

Irresponsable 1er a encore frappé


Pour le job de chef d'État, il y a plusieurs manières de rentrer dans l'Histoire. On peut bâtir, on peut innover, on peut inscrire de nouvelles lois, positives, apportant de nouvelles libertés. On peut être celui qui a construit Versailles, on peut être celui qui a aboli la peine de mort, on peut être celui qui a offert au peuple le musée du quai Branly. 

On peut aussi, à la manière d'un tueur en série, vouloir laisser un souvenir terrifiant pour les générations futures. On peut vouloir être Néron, Pol Pot ou Hitler. 

Macron n'est pas sérieux et n'a aucune ambition !

Il n'aura pas laissé sa marque dans l'histoire de France pour un musée de la saucisse ou pour une avancée importante de notre société : la loi sur la fin de vie aurait fait l'affaire,  malheureusement, même ça, il n'y est pas arrivé. 

Il ne va pas non plus laisser sa trace en despote, ce serait lui faire trop d'honneur que de le comparer à un Staline ou même à un Mussolini. 

Non. Il laissera simplement le souvenir vague d'un président irresponsable.

Après avoir décidé unilatéralement de dissoudre le parlement, ce qui a provoqué une période  incertaine et dangereuse pour la République, pour les institutions, pour la stabilité du pays, pour l'économie, il revient maintenant sur les résultats pour finalement ne rien changer en demandant à ce qu'on ne prenne pas en compte ce qu'ont exprimé les Français. 

Le premier tour ? Balayé. Les 11 millions de votes pour le RN, la confirmation de cette tendance au second tour, le nombre de députés d'extrême droite qui passe de 89 à 143, le nombre des députés de gauche, passant de 153 à 192 mais surtout le nombre de ses propres députés régressant à 163 alors qu'en 2022, ils étaient 245. Bref, il fait mine d'ignorer la réalité. 

Tout le monde s'accorde à dire, pourtant, que nous sommes à un moment critique de notre histoire. Un moment de bascule durant lequel nos institutions ont vacillé, où l'on a évité que notre constitution fragile tombe aux mains de ceux qui veulent la modifier. Les forces démocrates et républicaines ont globalement su faire preuve de responsabilité en se retirant quand il le fallait, en appelant à voter contre le RN. 

Ce moment laisse forcément des cicatrices, profondes, ouvertes. Sanglantes encore. Les électeurs du RN se sentent trahis. Leur message est encore une fois ignoré. 

Et le président propose le néant, le mou, le centrisme consensuel, la gestion des affaires courantes, aucun changement, surtout. Ne changeons rien, ne faisons rien. 

La gauche propose pourtant un choc social, une politique forte pour relancer l'économie, le pouvoir d'achat, pour rendre de l'espoir. Le président lui refuse la possibilité de seulement essayer quelque chose alors même que ce groupe arrive en tête à l'assemblée. 

La réponse d'Emmanuel Macron appelle clairement à la violence. Le sait-il ? En a t-il conscience ? Cherche-t-il, lui aussi, comme les électeurs d'extrême droite, le pire ? 

Cet homme n'est clairement pas à la hauteur.  La France court au burn-out  et il choisit le management par le pourrissement. Petit chef, Irresponsable 1er.

lundi 10 juin 2024

Les loups regardent vers Paris


J'ai tenu un bureau de vote, hier toute la journée. La tension était parfois palpable, la colère de certains, en glissant difficilement leur bulletin A4 plié en 6 dans la toute petite enveloppe estampillée République Française, dans la fente étroite de l'urne, était tangible : la mâchoire serrée, la main tremblante. 

Evidemment, je suis choquée par les résultats d’hier. Pas surprise, mais tout de même stupéfaite.

Stupéfaite, je le suis sans doute encore plus par la décision irresponsable de Macron. 

Cette dissolution est une mauvaise décision : elle est soit l’oeuvre d’un fou qui est tellement déconnecté du monde qu’il ne se rend même pas compte qu’il est impossible de reprendre la main, démocratiquement, en trois semaines, soit celle d'un vil calculateur, un Machiavel de bas étage qui pense faire un coup politique en laissant le gouvernement à l’extrême droite et en pariant sur son échec. 

Le pari est insensé. A moins que Macron soit un insensé.

L’extrême droite prendra les rênes. 

En Italie, c'est fait. Aux Etats-Unis, Trump a été élu durant 5 ans et aujourd’hui les Américains s’apprêtent à voter à nouveau pour lui. 

On ne joue pas ainsi avec le feu, on ne brise pas, juste pour s’amuser, les fondements de la démocratie. Car l’extrême droite n’est pas un petit parti, n’est plus un nain de l’échiquier politique : il a des villes, des députés et quelques sénateurs. Les élus du RN ont acquis une expérience, des compétences. Ils prendront le pouvoir et utiliseront les rouages démocratiques pour le garder. Et ils trouveront des gens de bonne volonté pour les aider : une fois qu'un parti a le pouvoir...

Ils mettront en oeuvre leurs idées mortifères. Pour avoir la majorité, ils feront alliance avec Marion Maréchal, avec Zemmour, avec Philippot ou Lalane, peu importe. Ce sera l’alliance du pire et ils n’hésiteront plus à montrer leur vrai visage. La culture sera sacrifiée, l’éducation connaîtra un retour en arrière autoritariste et rétrograde, les quartiers populaires seront délaissés. Une politique anti-sociale sera évidemment mise en place, au prétexte que les aides sociales ne profitent qu’aux feignants et aux étrangers. Si l’on souffrait déjà sous Macron, ce sera pire avec le FN. Ne croyons pas qu’ils feront une politique sociale, ce sera tout le contraire. Jamais, durant leurs années à l’assemblée nationale ou européenne, ils n’ont voté pour autre chose que pour une politique néo libérale. Et ils reviendront évidemment sur toutes les avancées sociétales : les droits des femmes, des LGBT reculeront, parce que c’est leur ADN. Plus de planning familiaux, plus de mariage pour tous, le droit à l’avortement réduit. Ils jurent aujourd’hui leurs grands dieux qu’ils ne reviendront pas là-dessus, mais il s’agit des fondements même de leur pensée. Il est naïf de croire que le parti n’est plus celui de Jean-Marie Le Pen, qu’il s’est lissé et qu’il a évolué.

Mais fi de ce cauchemardesque tableau. Croyons encore que la raison l'emportera. Mais où est la raison, quand un gouvernement brise tous les repères depuis 7 ans ? Où est la raison, quand un président fait une politique pour 5 ou 10% de la population, au mépris de tous les autres ? Où est la raison, quand les services publics disparaissent lentement, quand on doit payer de plus en plus pour être soigné ? Pour être mal soigné, par un hôpital déglingué, par une médecine de ville qui se fait de plus en plus rare...Où est la raison, quand les réformes se font aux forceps, que les millions de manifestants ne sont pas entendus, quand on se moque des oppositions à la réforme des retraites, à la réforme du chômage, à la hausse des prix, à la baisse des APL, à la suppression de l'ISF. On a beau gesticuler, le pouvoir s'est retiré dans sa tour d'ivoire et on a l'impression d'être devenu quantité négligeable. Alors on s'aigrit, on s'énerve et on finit par venir glisser en tremblant de colère un bulletin Bardella dans une urne, un dimanche matin. 

Cela n'excuse pas, mais ça explique. 

Alors espérons que les discours post gueule de bois électorale ne seront pas seulement des vains mots, comme c'est le cas depuis plus de 20 ans. "Le signal est fort, nous avons compris, nous devrons prendre en compte ce vote sanction." Et puis, dès le lendemain, tout repart comme avant, on supprime des lits dans les hôpitaux, on économise sur les postes de profs, on supprime les bureaux de poste et le train ne s'arrêtent plus dans les gares de campagne. On fait le jeu des agri industriels de la FNSEA, on donne des sous aux grandes entreprises du CAC 40 et cet argent ne ruisselle jamais jusqu'à l'ouvrier de base. Au lieu de cela, les usines se modernisent et n'embauchent plus personne, et quand les usines ont fini de se moderniser, elles se délocalisent. 

Cette fois, je veux croire que ce ne seront pas de vains mots, parce que ce matin, François Ruffin nous a rappelé qu'après la crise de 29, on était aussi au bord du gouffre en Europe et que si l'Allemagne avait choisi Hitler...la France avait opté pour le Front Populaire et qu'en 1936, on avait réduit le temps de travail, qu'on avait gagné des vacances, qu'on avait avancé socialement. 

Est-ce qu'un Front Populaire est possible en trois semaines ? C'est un défi à relever. J'y crois sans y croire, mais "Quand les blés sont sous la grêle, fou qui fait le délicat", comme l'écrivait Aragon. François Ruffin l'a cité aussi ce matin. Ne faisons pas les délicats, rassemblons les forces de la raison, de la solidarité, de la liberté. Retrouvons le goût de l'amour et de la fraternité. 


mardi 12 avril 2022

Tu vois, Marine Le Pen...


“Tu vois, Marine Le Pen, maintenant, elle récite une petite bible CGTiste. Et que je te défends les petits salaires et la retraite à 60 ans. Marine, elle parle aux petites gens. Tu vois ce que je veux dire ? C’est nouveau, non ? Et les petites gens, ils se disent, peut-être qu’elle a changé, peut-être qu’elle est vraiment peuple, cette mémère aux chats, avec sa voix de fumeuse de gitane ? Peut-être qu’elle n’a rien à voir avec son père, vraiment. Mais tu vois, on ne peut pas effacer comme ça des décennies de mépris du pauvre, de mépris de “l’assisté”, de celui qui mange le pain blanc des Français. C’est quand même un peu facile, non, entre les deux tours d’une élection présidentielle, d’enfiler le costume d’un Méluche et de venir faire tribune sur la France qu’on exploite et sur le travailleur pauvre. Pour un peu, elle enfilerait un gilet jaune et on la retrouverait sur un rond point. Et vous trouvez ça crédible ? Mais attention, une fois que j’ai dit ça, je n’oublie pas que le costume de gauchiste ne va pas mieux à Macron ! Non, lui, c’est plutôt Smuggler…Pour te donner une idée, un RSA ne suffit pas pour une veste de cette marque. Macron, pour l’instant, il est beaucoup plus mou que Le Pen pour capter les voix de gauche. D’abord, il pense que le front républicain marchera encore cette fois. Ensuite, il a fait encore plus de voix au premier tour qu’en 2017. Plus d’un million de voix de plus. Alors qu’il a mené une politique ultra-libérale, que les prix ont augmenté comme jamais depuis qu’il est au pouvoir, que les services publics ont souffert et qu’il promet encore pire cette fois-ci. Alors à quoi bon s’en faire. Non, il va être réélu, malgré les gilets jaunes, malgré la baisse du pouvoir d’achat, malgré la précarité galopante, l’industrie fragilisée, les hopitaux au bord de l’asphyxie…Il va être réélu, peut-être à cause de ses jolis costumes, mais surtout parce que ceux qui votent fort pour lui sont les boomers qui ont peur pour leurs privilèges. Ceux qui ont tout intérêt de voir le système des retraites consolidés pour longtemps, ceux qui ont fini leur vie, ceux qui n’ont plus d’enfants à l’école ou qui leur paye une école privée. Ce sont ceux qui ont de l’argent et qui ont décidé de ne pas se soucier de ceux qui n’en ont pas. Macron n’a absolument aucun intérêt à faire semblant d’être de gauche. On ne peut pas lui reprocher d’être insincère, sur ce coup-là. Mais tu vois, si c’est ce que les gens veulent, est-ce que ce n’est pas ce qu’on appelle la démocratie ?”

lundi 11 avril 2022

Tu vois, les élections...


"Tu vois, ça fait 20 ans que je vote pour les présidentielles…eh ben, l’effet que ça me fait, c’est que les élections, c’est un coup de chapeau à un âne, comme disait mon grand-père. Depuis hier, tiens, j’ai l’impression d’être dans le film Un Jour sans fin, tu sais. On revit encore une fois ce fameux second tour piège…Depuis 2002, c’est comme ça. Et nous, on plonge, à chaque fois dans la fameuse dialectique du front républicain...Mais la démocratie et la République, si ce n'est pas l'expression d'un véritable choix, ça n'a pas tellement d'intérêt. En parlant de mon grand-père, je crois que le 24 avril, je vais lui rendre hommage. En 2002, il n’avait pas voté pour Chirac. Il n’était pas allé voter du tout, en fait. Pour un peu, je crois qu’il aurait presque préféré aller à la messe comme ma grand-mère, ce jour-là. Et pourtant, mon grand-père, c’était le pire bouffeur de curés que je connaissais. Mais finalement, il n’avait pas tort. C’est un peu comme si au resto, si la carte des desserts se résume à une Danette ou un petit-suisse et que tu n’as envie ni de l’un, ni de l’autre, tu te forçais quand même à prendre le petit suisse parce que c’est dans la formule et que tu te sens obligé de choisir…ça n’a ni goût ni grâce, le petit suisse, c’est trop gras, le petit suisse, oui, mais la Danette, c’est carrément gerbant…Alors tant pis pour la formule, ce n’est pas parce que c’est écrit qu’il faut que je me force. Ce sera un café et l’addition, pour moi. Et surtout, il faudrait maintenant qu’on évite de retourner dans ce resto pourri, parce que la carte des desserts est vraiment naze…"

dimanche 10 avril 2022

Tu vois, tout respire le printemps...


“Tu vois, tout respire le printemps. Ce que je préfère, ce sont les trèfles…et l’herbe aussi, bien verte, bien drue, bien touffue. Ce vert si vigoureux, tellement plein de chlorophylle, tellement…je ne sais pas, c’est cette idée de sève, de vie, de vitalité…Ce vert, ça me met en joie, ça me donne de l’énergie. Et puis ça me fait penser à mon père. Mon père n’aimait cette couleur que dans la nature. Il n’aurait jamais porté une chemise verte. Par contre, il aimait tellement les centaines de nuances de la forêt au printemps…La forêt qui étale son manteau au flanc de la montagne…Son manteau où le tendre des jeunes feuilles de châtaigniers contraste avec le vert profond des sapins qui font des tâches plus sombres à côté des cerisiers sauvages au vert léger nuancé par le blanc des fleurs. Cette saison, c’est la promesse de la vie, de la jeunesse, de l'allégresse. Je m’emballe, mais tu vois, quand je contemple la rivière qui scintille au soleil, qui coule vraiment, maintenant qu’il a plu un peu, enfin, je sens monter en moi cette énergie. Je ne sais pas l’expliquer bien. Je n’ai pas les mots exacts. Je me sens vivante, partie prenante de cette nature revigorante. Je me sens traversée par cette force, la force de la rivière qui trimballe les pollens, la boue, la neige qui a fondu, les bois que le vent a cassés. La rivière et ses alevins, ses poissons en devenir, la rivière pleine de vie. La nature, parfois, dans nos vies de fous, on oublie de la regarder, de l’écouter. Pourtant, tout respire le printemps et c’est cela qui nous permet de respirer. De vivre. Je suis une citadine, maintenant, j’aime les trottoirs, les voitures, les magasins, les êtres humains qui vont et qui viennent, j'aime cette vie là, mais rien ne m’émeut autant que le chant des oiseaux dans le petit matin. C’est un bonheur sans fin, cela. Dès la fin de l’hiver, si tu te lèves tôt, avant le lever du soleil, tu les entends, c’est une joie, c’est…Je ne sais pas l’expliquer. C’est de l’ordre de la sensation, de l’émotion. Je pense que ça touche à…notre cerveau le plus archaïque, notre part animale. On fait partie de ce monde, de ce renouveau, de…cette abondance de la nature. Je dis ça parce que c’est le printemps, mais…je ressens la même chose quand l’été bat son plein et que dans les aubes tièdes du mois de juillet, on entend le raffut des martinets dans le ciel clair, je ressens la même chose lors des beaux crépuscules d’automne, quand l’air s’embrasse à l’horizon, quand la lumière vient illuminer la cime jaune orangée des arbres. Toute cette chaleur, toute cette douceur. J’adore. J’aime l’hiver aussi, surtout quand ils sont scintillants de froid, les grands ciels bleus translucides et glaciaux. J’aime les soleils d’hiver givrés. Et je te parle d’ici, je te parle de ce que je vois de ma fenêtre, mais, la nature, je l’ai aimée partout où je suis allée : les canyons américains, les plaines du nord, l’incroyable terre noire et fertile des plaines du nord, la luxuriance de l’Asie, la vie grouillante des marécages de Louisiane…Partout…C’est la force, c’est l’incroyable force de la nature. Celle devant laquelle on se sent tout petit, mais…à sa place. A sa place dans le cosmos, partie prenante, vraiment, de l’univers. On ne sait pas si c’est Dieu ou juste le hasard qui a créé ces beautés là, mais quelle réussite…On ne sait pas qui on doit remercier pour tout ça, mais bon sang…quelle chance on a d’en faire partie…”


samedi 9 avril 2022

Tu vois, les pigeons...


“Tu vois, les pigeons qui s’engouffrent dans cette maison, par dizaines, même peut-être par centaines…Ce ne sont pas vraiment des pigeons. Tu as vu leur côté mécanique, régulier…Si, si ! Je suis resté là à les observer un petit moment, j’ai noté les heures, les flux. C’est troublant. J’ai fini par comprendre : on a à faire à des drônes, des robots téléguidés. C’est la mairie ou le gouvernement, la police…Ou pire. Comment ça, je délire ? Mais non ! Les caméras de vidéo surveillance, ça suffisait plus, je te jure : il faut des moyens bien plus mobiles, bien plus agiles, si tu veux vraiment fliquer tout le monde. Les pigeons, c’est l’idéal : ça passe complètement inaperçu, ça fait partie du paysage, comme…je sais pas, les poubelles, les crottes de chien…D’ailleurs, un jour, je t’en parlerai, des crottes de chien ! Mais revenons à nos pigeons…Alors…tu vois leur manège : ça rentre, ça sort. Il y a deux escouades. Ceux qui rentrent ne sont pas les mêmes que ceux qui ressortent, pour la simple et bonne raison que cette vieille baraque abandonnée, au toit défoncé, c’est en fait là qu’il y a les bornes de rechargement pour ces trucs. Hop, ceux qui rentrent se posent près de la prise et comme ton aspirateur robot, ils se rechargent la batterie. J’ai observé : ceux qui rentrent sont gris et ceux qui ressortent sont un peu moins gris ! Je te jure. Bon, le résultat, c’est qu’ensuite, toi, tu te poses tranquillement sur un banc dans le square, tu parles de tout et de rien avec ta copine et pendant ce temps-là, t’as des pigeons qui viennent picorer, l’air de rien sur la pelouse, à tes pieds. Et leurs yeux, c’est l’objectif de la caméra et le petit micro. J’ai cherché sur internet, la technologie peut faire des choses miniatures comme ça. L’intérêt ? Tu me demandes l’intérêt ? Mais quelle naïveté ! Tu ne vois pas dans quelle société on vit, ou quoi ? Tu n’as pas remarqué que quand tu parles…je sais pas…d’une paire de godasses que tu trouves sympa, hop, deux minutes après, tu as les pubs pour ces godasses partout sur internet, rien que pour toi ? Tu n’as pas l’impression d’être fliquée, poursuivie, espionnée ? Partout, tout le temps ? Et puis alors depuis le passe vaccinal et toutes leurs conneries de virus, de pandémie, de masques…c’est encore pire. C’est l'État qui est derrière tout ça, les États du monde entier. Il faut qu’ils contrôlent tout, qu’ils nous contrôlent. Tu rigoles, mais tu verras. Et puis les drônes pigeons, ils ont d’autres fonctions et en cas de problème, crois-moi, on fera pas le poids. Des fléchettes empoisonnées, ça peut te tuer en deux secondes et sans laisser de traces…Non, mais arrête de te marrer. L’autre jour, tu sais, on a trouvé ce vieux, dans le parc, tu sais, le Jacquot, oui, il passait sa vie sur les bancs, avec sa bière à la main. On l'a retrouvé étendu dans la pelouse, mort. Pas de doute pour moi : c’est un drône pigeon qui l’a rectifié. Je suis sûr que pour l’instant, ils en sont à la phase de tests, ils attendent de voir si on se rend compte de quelque chose ou pas, et ça va être un carnage ! Mais oui, mais bien sûr, il était vieux, le Jacquot, mais c’est pas une raison. Mais non, c’est pas “juste son coeur qui a lâché à force de boire”, ça faisait des années qu’il picolait, son coeur avait l’habitude. Non, j’en suis sûr : le parc, les pigeons, les pigeons tueurs. Tu as vu le film Soleil vert ? Un jour, crois-moi, des vieux comme le vieux Jacquot, on en retrouvera dans les raviolis…Allez, bon appétit !”

vendredi 8 avril 2022

Alors, tu vois...

 


“Alors tu vois, j’étais nue au milieu d’une salle remplie de cochons d’Inde. Mais ce n’était pas vraiment des cochons d’Inde. Moi, en fait, je savais que c’était des chirurgiens dentistes. En congrès, un truc comme ça. Mais je les voyais comme des cochons d’Inde. Bon. Avec des masques. Et moi, j’étais toute nue, plantée là, les mains vaguement sur mes nichons, vaguement sur mon sexe, essayant de planquer ce qu’il y a à planquer, mais sans grands espoirs. Et puis surtout, j’étais dans une grande salle qui ressemblait…je sais pas…à une usine désaffectée, tu sais. C’était plein de lumière, un grand soleil qui passait à travers les carreaux cassés…et c’est bien pour ça qu’en fait, moi, je savais que j’étais dans ma salle de bains. Tu sais ce que c’est, les rêves. Bon. Justement, j’étais dans ma salle de bains et tout à coup, j’étais une brosse à dents. Me demande pas comment, mais en tout cas, pour moi, rien de plus normal. Une brosse à dents géante. Et j’étais enceinte. Alors forcément, les cochons d’Inde commençaient à me bouffer les pieds et à pousser des petits cris très angoissants. C’est à ce moment-là que j’ai abandonné la position de repli, les bras croisés pour me planquer et que j’ai levé les bras au ciel. J’avais les poils de la brosse à dents qui frissonnaient et l’impression qu’on me grignotait vraiment les pieds, comme des fourmis dans les orteils. Et ça m’a réveillée. Mais pas tout à fait. Juste pour me rendre compte que j’avais réellement les bras en l’air et que j’essayais vraiment de m’exprimer en poussant des petits cris. Mais tu sais, dans un demi-sommeil, alors les petits cris me demandaient un effort surhumain, ça voulait pas sortir, c’était ridicule, ça faisait “hi, hi, hi”. Et Jérôme, à côté de moi, ça l’a réveillé. Mais complètement, lui…alors il m’a secouée un peu, en disant “oh, oh, tu te calmes…” Et ça m’a réveillée complètement aussi. C’est con, j’aurais bien voulu poursuivre ce rêve. Mais comme j’étais encore un peu dedans, dans le coltard, même, carrément, j’ai dit à Jérôme, tu vas rire, je suis enceinte. Il a pas ri.”