Pages

dimanche 29 novembre 2020

Déconfinement progressif d'un demi-confinement brutal


Dans cette période étrangement inexistante qui nous sépare de Noël, nous sommes donc en non-déconfinement, autrement dit en déconfinement progressif, suite à un confinement à demi, un confinement pas tout à fait confinant pour tout le monde, durant lequel on pouvait travailler et consommer dans les supermarchés et sur internet, mais où l'on ne pouvait pas acheter de culotte dans une lingerie ni même dans le rayon adéquat chez Carrefour, mais où l'on pouvait porter ses cachemires au pressing et où l'on ne pouvait pas acheter de livres, ni dans une librairie indépendante, ni à la Fnac, mais par contre, un ordinateur, une tablette, un iPhone 12, oui. 

Aujourd'hui, on peut réserver un séjour à la neige, à condition de maîtriser l'art de la peau de phoque, si l'on veut monter au sommet avant de redescendre les pistes. On ne pourra pas non plus manger de fondue dans un restaurant, naturellement, ni boire de vin chaud aux pieds des pistes, ce qui fait tout de même le charme de ces séjours coûteux et mal confortables (qui aime vraiment marcher sur du verglas avec des chaussures de ski alpin et chargé comme une mule avec ses skis à l'épaule, qui se désolidarisent et qui glissent en vous coupant les doigts, je vous le demande ! Qui aime vraiment aller faire pipi en combinaison de ski, dites-le moi !)

On pourra faire Noël, mais sa messe sera soumise à des règles strictes : ne vous passez pas la paix, ne buvez pas de ce vin, ne mangez pas de ce corps !

Et puis tout cela, ce ne sont que des recommandations, dans le fond. Personne n'y comprend plus rien : qu'en est-il du couvre-feu, de la règle des retrouvailles familiales à 6 personnes, à ces interminables attestations à remplir, à ne pas remplir (faut-il l'attestation de l'employeur et une attestation individuelle de déplacement, en plus, oui ou non ? Et savez-vous que les forces de l'ordre n'ont pas d'outil pour lire les QR codes générés par l'appli du gouvernement ?) 

On nage tellement en plein n'importe quoi qu'on ne sait plus tellement quoi faire, en vrai. 

Depuis hier, c'est déjà ça, on peut retourner dans les magasins en ville. C'est une bonne chose pour les commerçants. Je ne suis pas épidémiologiste, mais il m'apparait clair que je fais bien plus confiance à l'abus de gel hydroalcoolique qu'on y pratique plutôt qu'à la moindre poignée de caddie. 

Et j'ai pu retourner chez le coiffeur. Mais pas au restaurant, par contre. Sauf au seul resto qui marche pendant la crise sanitaire : les Restos du Coeur. Quel crève-coeur que ce soit le seul resto qui fasse le plein - et comment...- en ce moment ! Donnons, si nous pouvons : https://www.restosducoeur.org 

Et puis déconfinons-nous en douceur de ce non confinement. Pour moi, par exemple, rien ne change vraiment : je vais continuer d'aller en classe, avec mes petits 6e affreux, sales et méchants, dont le masque sert de mouchoir, de bavoir, de buvard et de cache-nez par intermittence. Je vais continuer de les voir se checker et se faire des câlins dans la cour, se refiler leurs stylos après les avoir grignotés, laisser traîner leurs mouchoirs en papier usagés partout. Je vais tenter de ne pas être parano. Je dois être immunisée, si je n'ai pas encore été contaminée. 

Protégez-vous, protégez vos proches et portez vous bien !

dimanche 22 novembre 2020

On garde le moral !


Je n'ai pas à me plaindre, je suis d'une nature optipessimiste...ou pessoptimiste, si vous préférez. Je m'explique : je suis du genre à me dire que puisque tout va mal et que ça va aller en empirant, nous n'avons pas d'autre choix que de voir le bon côté des choses. 

Je ne vais pas vous refaire le coup des petits plaisirs de la vie, quoi que le confit de canard et ses légumes d'automne, suivi d'une tarte aux pommes, ce midi, ça valaient le coup de fourchette.

Je ne vais pas vous refaire le coup des lectures revigorantes, bien que je vous conseille la lecture du 1 de cette semaine : "Comment ne pas devenir fou ?": en voilà une question, qu'elle est bonne !

Je ne vais pas vous bercer de douces mélodies anesthésiantes, bien que la musique, il n'y a que ça de vrai, croyez-moi ! L'avez-vous écouté, le dernier album de Norah Jones, Begin again ? C'est bien. Sa voix, depuis 2002, depuis Come away with me, est devenue plus profonde, plus patinée, tout en conservant sa douceur. 

Je ne vais pas occuper votre espace cérébral disponible avec des séries à n'en plus finir, mais vraiment, The Undoing dont j'ai vu les 4 premiers épisodes ce week-end, est vraiment captivante. 

Par contre, je veux vous parler de l'action du Secours populaire qui consiste à préparer des cadeaux de Noël pour les plus démunis : quelque chose de chaud, quelque chose de bon, un mot doux, un loisir, un produit de beauté. Et on emballe ça avec amour dans une boîte de chaussure. 

Par contre, je peux vous parler des collectivités qui ont mis de l'argent pour financer des bons d'achat chez les commerçants de notre coin : pensez à tout ces petits artisans, ces marchands de bonheur de notre ville, qui nous font de belles vitrines, qui nous permettent de trouver ce qu'on ne peut pas essayer sur Amazon et ce qu'on ne peut pas toucher sur Wish. Ils nous permettent d'être sûrs de ne pas être déçus en déballant un colis venant de Chine, et ça, ça n'a pas de prix ! Pensez aussi aux restaurateurs, qui nous permettent de passer des soirées sympa, entre amis ou en amoureuses. S'ils venaient à faire faillite, nous déprimerions encore plus. 

Tant qu'il y a de la solidarité, tout n'est pas perdu. Et continuons d'être prudents ! Portez-vous bien !

dimanche 15 novembre 2020

Il faut partager ses recettes


La recette du bonheur, parfois, c'est juste de partager ses recettes. Aujourd'hui, j'ai fait un rosbif au four. Une recette sans rien de particulier, je le masse avec amour avec un peu d'huile d'olive, de l'ail écrasé, du sel, du poivre de Madagascar, un peu de thym et je l'entoure d'un peu de beurre. Ensuite, on compte un quart d'heure par livre dans un four bien chaud et c'est prêt. 

J'ai accompagné cette belle pièce avec un gratin de fenouil. J'ai fait un roux brun à ma manière, c'est à dire que j'ai fait fondre du beurre avec de l'ail écrasé — je suis très ail écrasé, aujourd'hui, c'est bon pour la circulation du sang — j'ai saupoudré de farine, en pluie, en mélangeant le tout avec un fouet et quand la couleur était à ma convenance, joliment dorée, et que la consistance était lisse et pâteuse, alors j'ai incorporé du bouillon en continuant de mélanger pour éviter les grumeaux. Les fenouils avaient préalablement cuit à la vapeur et ils étaient tendres comme un bonbon à l'anis. Je les ai disposés dans un plat à gratin, j'ai parsemé du comté sur leur fesses rebondies et j'ai versé mon roux dessus. J'ai ensuite mis cela au four à côté du rosbif. 

C'était bon. 

Malheureusement, je n'ai pas la recette de gâteau de Savoie de la grand-mère d'Amandine. C'était une pâtissière extraordinaire. Elle a emporté avec elle les secrets et les tours de main merveilleux pour ses forêts noires et son fameux gâteau de Savoie parfumé au citron, tellement léger et délicat, tellement aérien...

mercredi 11 novembre 2020

Quelques moments...

Moment poétique pendant la promenade sous le pâle soleil de novembre : 

C’est un trou de verdure où chante une rivière, 
Accrochant follement aux herbes des masques jetés à terre. 

Moment insolite du jour : 

Pour pouvoir cocher la case “Sortir mon animal de compagnie” sur l’attestation dérogatoire, un couple de charmants monsieur dame a décidé de balader sa perruche, dans sa cage. Petit effet surréaliste très mignon. 

Moment émouvant : 

Cérémonie du 11 novembre avec un public clairsemé. La Marseillaise jouée sur l'orgue du Temple par Madame M. était particulièrement émouvante. Merci...

Un grand-père est venu me saluer à la fin du trop court dépôt de gerbe. “Je me souviens, les années précédentes, la foule, les militaires en grande tenue...C’est triste, cette année. Ah ! Il y a un ou deux ans, il y avait l'harmonie et ils avaient joué La Madelon...Mon petit-fils avait adoré, il avait chanté ça tout l’après-midi, ensuite…” 

Moment méthode Coué : 

Je vais bien. Il fait beau. Je me détends, sans trop me prendre la tête. Je ne crois pas être malade. Je pense que je ne suis jamais malade. J’éloigne le mal avec la superstition du mal. Avec l’hypocondrie schizophrène qui consiste à dire que je suis malade sans y croire une seconde. A la vérité, je me pense invincible. Exactement comme entre deux crises de migraine : quand cela fait quelques semaines que je n’ai pas eu de crise de migraine, je pense que je n’en aurai plus jamais. Que je suis devenue résistante, que je suis guérie. Quand elle revient, d’ailleurs, je ne crois pas en elle, je ne prends pas le médicament de crise à temps, pensant toujours que ce n’est pas possible, qu’elle ne reviendra plus. J’ai une confiance démesurée en mon corps. Je suis persuadée qu’il ne me lâchera pas. Je suis exactement dans cet état d’esprit pour le COVID. Il ne passera pas par moi. Je coche toutes les cases qui permettent de ne pas l’avoir : je suis une femme sans co-morbidité, sans symptôme agravant, sans asthme, sans diabète (je n’ai pas fait de prise de sang depuis si longtemps…), sans cholestérol, sans obésité. Je ne fume pas, je suis relativement active. Je mange sainement. Je suis du groupe sanguin O. Je n’ai aucune chance de l’attraper, sinon, ce serait déjà fait, entre les élections en mars ou le retour en classe dès le mois de mai, ou encore cette rentrée au collège dans des conditions pas sanitaires du tout...n’est-ce pas ? Je suis même un cas d’étude pour la médecine, soyons honnête. Mais mes intestins sont bel et bien patraques, mon estomac, pas terrible. J’ai pris des cachets, mais j’ai eu mal à la tête une bonne partie de la journée et je ne peux pas nier une certaine fatigue, des cernes immenses sous les yeux alors que cela fait maintenant une semaine que je suis au repos le plus strict, que j’ai plutôt bien dormi et bien mangé...Je devrais avoir une pêche d’enfer. On verra demain matin.

 

lundi 9 novembre 2020

Cultiver les petits bonheurs du jour


Ma peau a pâli déjà, l’été est si loin. Nous n’avons pas vu le temps passer. Point commun avec le premier confinement : il fait beau. Différence : le confinement ? Quel confinement ? Des voitures partout, tout le temps, des passants qui passent, tout semble continuer. 

Je le sens bien, moi, depuis jeudi dernier, le confinement, puisque je suis cas contact. J’ai été testée ce matin, j’attends les résultats avec successivement tous les symptômes de la parfaite hypocondriaque stupide que je suis : léger mal de tête qui s’estompe aussitôt que je n’y pense plus, impression d’oppression dans la poitrine, sensation d’étouffement, impossibilité de reprendre mon souffle, gorge qui soudain s’irrite. Petite panique en ayant l’impression que je n’ai plus de goût. Soudaine envie de vomir. Troubles intestinaux...mais j’en ai tout le temps. 

J’ai tenté le travail à distance avec mes élèves : deux classes de 25 sixièmes, des devoirs envoyés à chacun d’eux, une seule réponse. Sentiment d’échec. En même temps, une prof absente, c’est toujours du bonheur pour les élèves. Je me souviens de la joie que nous avions quand dans le couloir, devant la salle de classe, nous apprenions que Mme Machin, prof de maths était absente. C’était des cris de joie ! Le surveillant (qu’on appelait alors “pion”, ce petit surnom a complètement disparu, c’est un mystère de la langue française) calmait alors nos ardeurs “C’est pas sympa pour Mme Machin ! Elle est malade !” Et nous prenions un air un peu contrit et tout à fait hypocrite pour plaindre gentiment Mme Machin, parce que dans le fond, nous étions bien élevés. Mis à part le défunt mot “pion”, rien n’a vraiment changé : les élèves sont toujours ravis de l’absence d’un prof, même s’ils l’aiment bien. C’est bien naturel. Et je suis heureuse de leur faire cette joie. 

Si tout va bien, j’aurai les résultats demain, ils seront négatifs et je retournerai au collège en fin de semaine. 

En attendant, les nouvelles de Savoie sont très mauvaises. C’est le département le plus touché par l’épidémie, cette fois-ci. Ma mère a l’air d’être plus sage qu'au printemps. Mais les grands-parents d’Amandine nous inquiètent vivement. 

L’ambiance épouvantable du moment, entre menace terroriste et pandémie, nous pousse à nous centrer sur les petits bonheurs du jour, à les cultiver, à les partager, autant que possible. C’est une condition de survie.  

Partager ses lectures - moi, j’ai bien aimé Yoga d’Emmanuel Carrère et je suis en train de relire 1984, dans la nouvelle traduction. C’est bien, mais ça, je ne le conseille pas vraiment pour se remonter le moral. Pour rire un peu, préférez plutôt le dernier Fabrice Caro, Broadway. La première moitié du livre vous offre un fou rire par page, si vous êtes bon public.

Partager ses petits plats - à midi, j’ai fait un wok de boeuf au chou et aux nouilles sautées, c’était pas mal. Ce soir, j’ai fait une tarte au saumon, avec un peu d’aneth et des baies roses. C’était bon. 

Partager de la musique - la musique est idéale, pour ne pas penser. Tenter de comprendre les paroles quand elles sont en anglais. Des chansons d’amour, des chansons douces. To chill, en anglais. S’accrocher au timbre d’une voix, à son grain, à sa profondeur ou à sa fragilité. A la voix familière des chanteurs que j’aime. Les voix réconfortantes, enrobantes, thérapeutiques d’Elvis, d’Alain Souchon, de Chet Baker, de Damien Rice, de John Mayer... Ne pas se laisser atteindre par les mauvaises nouvelles. Être dans une bulle. 

Partager avec ceux qui sont loin - rester en contact permanent avec Florence qui nous envoie des vidéos du petit Rémy qui parle presque, maintenant, et qui a des tas de choses à raconter. Tellement adorable. J’ai eu ma mère, aussi, comme chaque jour. Si loin, si triste, mais quand j’arrive à l’aider pour ses mots croisés, comme si j’étais à côté d’elle, alors je suis contente. Escargot, en deux mots ? Petit gris. Et puis ce soir, Florence, ma chère Flo tellement loin de moi, tellement proche aussi : une amie avec qui on renoue le fil de la conversation comme si on s’était quittées hier, ce qui est sans doute le signe des grandes amitiés. 

La vie continue, faisons la douce.

 

dimanche 8 novembre 2020

Angoisse tenace

Continuons avec les petites angoisses à déposer ici, pour qu’elles cessent de fermenter dans les caves de mon cerveau. Je tiens par avance à m'en excuser.  

J’ai été beaucoup plus touchée que je ne pensais l’être par la mort de Samuel Paty. Je pensais que l'on s'habituait à cela, que 2015 était une sorte de vaccin. Mais non. Le traumatisme ne fait qu'empirer. 

Je veux rendre hommage à mes collègues d’histoire qui vivent depuis cette rentrée des moments très pénibles : des menaces froides, parfois anonymes ou basées sur la rumeur. Des réactions effrayantes. Des situations similaires à ce qu’a vécu Samuel Paty. Et les profs de toutes les autres matières ne sont pas loin derrière, puisque cela fait déjà quelques temps qu'il faut du courage et peut-être même de la témérité pour enseigner les textes fondateurs en français, la théorie de l'évolution en SVT ou encore le Big Bang en physique.

Les professeurs d’histoire, de lettres, de SVT, de physique-chimie...tous les professeurs font un travail essentiel. Ils disent les faits et les lois. Ce qui s’est passé et ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas. Ce que l'on peut croire et ce que l'on doit savoir. Mais nous sommes face à certains enfants dont le milieu social tout entier a retourné la tête depuis toujours. Leur norme n’est pas la nôtre : le quartier dans lequel j’exerce mon métier s’est ghettoisé depuis 15 ans. Les catégories sociales les plus pauvres sont les seules à y être restées. Les classes moyennes sont parties, petit à petit. Moi la première. J’y vivais il y a encore 11 ans. Pourquoi suis-je partie ? C’est un quartier qui a vu progressivement se réduire tous les services publics ou pas de proximité, qui a vu sa population s'appauvrir, qui a vu ses logements se dégrader. La politique de peuplement des bailleurs sociaux y est pour quelque chose, l’argent qu’on attribue à ceux-ci, aussi. Quand je vais porter des devoirs à des élèves dans le coeur des immeubles, je suis atterrée par l’insalubrité, par la vétusté, par l’isolation défaillante, par les façades décrépies de ces tours des années 60. On a rien fait, ou si peu, depuis, pour entretenir et moderniser le quartier. 

Aujourd’hui, non seulement seuls ceux qui n’ont pas pu partir y logent encore, mais en plus, c’est là qu’on a installé les nouveaux arrivants : parce qu’il y a des appartements pas chers. C’est donc là que s’entassent tous ceux qui arrivent, encore plus pauvres, parlant encore moins le français, ayant encore moins accès à un emploi, aux aides, à la culture du pays. Le seul point de rassemblement, hormis la misère, c’est évidemment la religion, la mosquée. C’est l’identité tout entière de ce quartier. Qu’on ne s’étonne pas de ne pas peser lourd. La République, le sentiment d'appartenance à un peuple n’existent pas, mis à part à l’école. Et l’école ne représente pas grand chose. Encore moins depuis le confinement. L’école a disparu de ce quartier pendant 6 mois. Et entre temps, à chaque fois qu’on parle d’eux, de leur religion, c’est pour évoquer les crimes commis en son nom. 

J’ai été une ado, pas plus rebelle qu’une autre, mais je comprends qu’on ressente de la colère quand ce qui nous tient le plus à coeur, ce qui fait partie intégrante de notre identité profonde est attaqué sans nuance, et s'il se trouve quelques adultes malveillants qui attisent ces colères, le pire peut arriver. Quand on met tous les musulmans dans le même sac sans distinguer religion, islamisme politique et terrorisme, c’est insupportable. Ce n’est pourtant pas ce que font les profs. Mais nous représentons de manière un peu floue pour ces ados, à la fois l’autorité, la classe dominante, les médias, les politiques. Et nous sommes à peu près les seuls à le faire dans ces quartiers, avec les pompiers et les policiers. 

Ces constats sont assez confus, mais je crois que la situation est plus dangereuse, plus explosive que ce qu’on veut bien croire. Et ce n'est pas la première fois que l'on tire la sonnette d'alarme. Mais vous savez quoi ? S'occuper de ces quartiers, ça coûte un pognon de dingue...

 

samedi 7 novembre 2020

La menace approche


La semaine dernière, j’étais cas contact de cas contact. C’est à dire que je n’étais rien pour la sécurité sociale. Mais j’ai quand même bien angoissé en attendant le résultat de mon cas contact. D’autant que je vis avec. Il s’est avéré que le test était négatif. 

Cette semaine, je suis cas contact. Le grand mal approche. J’attends donc les 7 jours après mon dernier contact avec mon cas positif. Je l’ai vu lundi pour la dernière fois. Ce lundi matin, je serai donc testée pour la première fois. J’angoisse. Et j’angoisserai en attendant le résultat. 

La semaine prochaine, peut-être serai-je positive. 

En attendant, confinement. Puisqu’il faut vivre le moment présent, intensément, alors, vivons-le. Vivons le moment historique de cette pandémie mondiale : je suis cas contact. Je vais peut-être vivre dans mon corps ce virus. Ce serait bête, peut-être (même si ce serait bien moins douloureux, sans doute) de ne pas vivre la maladie, de ne pas la ressentir, de ne pas être au diapason du monde, sur ce coup. Un peu comme si...Jean Moulin avait passé la guerre en Suisse... 

(Je sais que j’écris n’importe quoi. Pas la peine de me le dire en commentaire. Oui, cette comparaison est indigne. C’est de l’humour. Ne laissons pas le virus nous faire perdre le sens de l’autodérision et de l’humour noir. C’est peut-être bien tout ce qui nous reste.) 

Au collège, le jour de la rentrée, il y avait déjà de très nombreux absents “cas contacts” - comme moi en fin de semaine. On a eu l’information d’un cas positif. Et le lycée d’à côté a plus de cent cas positifs. Le grand-père paternel et la grand-mère maternelle de ma chère et tendre sont positifs. On connaît désormais tous de très nombreux cas positifs. Le balai des avions va reprendre à l'aérodrome, pour amener et emmener des patients en réanimation. Ce matin, il y avait trois pages pleines d’avis de décès dans le journal. En Savoie, les pompes funèbres crient au secours

La deuxième vague est plus importante que la première. 

Le gouvernement doit imposer un reconfinement total. La demi-mesure qui consiste à laisser s'entasser les élèves dans des classes, à laisser des gens s'entasser dans les transports en commun, ne confine qu'au ridicule.

Mais pas de panique, pour l'instant, je n'ai pas de fièvre. 

dimanche 1 novembre 2020

Comme un dimanche soir...

Ce confinement, au mois de novembre ressemble à une grande dépression collective. Il a plu tout le jour, les feuilles des arbres n’ont même plus les jolies teintes dorées qui faisaient du soleil suspendu aux dessus de nos têtes, au début de la semaine. Nous entrons dans la période la plus triste, la plus grise de l’année. Les jours raccourcissent. 

Nous pensons au printemps dernier. Nous nous souvenons du traumatisme lors des annonces prolongeant le confinement. Et pourtant, il faisait beau et nous allions vers l’été. Nous ne savons pas si nous pourrons supporter cela au mois de décembre. 

Et en plus, j’ai vraiment déconné : je ne suis pas allée chez le coiffeur... 

J’ai parfois l’impression que nos existences - telles que nous les avons vécues jusque là - sont terminées. Je sais que c’est stupide, que la vie réserve des surprises, qu’il y a toujours des libertés à prendre, des chemins à découvrir. Que tout ce qu’on ne connaît pas encore, nous pourrions en faire des encyclopédies en 12 volumes. Cependant, j’ai l’impression que la sensualité et l’amour vont disparaître, le plaisir, les douceurs du quotidien, que les rencontres et les voyages deviennent impossibles. Je ne sais pas ce que l’on peut encore offrir d’espoir et de perspectives d’avenir aux jeunes. Ce monde est vieux. Je ne suis pas loin de penser que l’on confine, que l’on interdit, que l’on contraint, que l’on restreint juste pour protéger les vieux. Et pourtant, j’ai envie de revoir ma mère. Vivante. J’ai encore envie de la prendre dans mes bras et de l’embrasser. La situation est terrible en Savoie. Les services de réanimation entre Aix-Les-Bains et Chambéry ne sont pas loin de la saturation. 

Je suis en permanence entre deux types de pensées totalement contradictoires. En tant que personne, en tant que fille, en tant que femme, je veux qu’on protège autant que l’on peut protéger, je veux qu’on évite à tout prix les drames, les deuils et les larmes. Et en tant qu’être doué de raison, j’ai la tentation de penser qu’il faut faire avancer le monde, vivre, donner le quitus à la jeunesse, à la vie, à l’énergie, à l’amour, à la force qui va. Je crois que c’est le paradoxe qui nous taraude tous, en ce moment. Un désir de vie, quoi que l’on en pense.