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vendredi 10 avril 2020

Journal de guerre contre un virus #26

Joyeuses Pâques
Je n’ai pas de fièvre.

Putain, trois jours.

Trois jours de week-end. Comme si ce n’était déjà pas assez long et tranquille sans ça. Je n’en peux plus de ces vacances interminables. Comment ça, ce ne sont pas des vacances ? Du soleil, du temps libre...comment vous appelez ça, vous ?

Lundi soir, le président va à nouveau parler. Jusque là, on sait seulement que l’on ne sortira pas de ce confinement le 15 avril comme il était prévu initialement. Tout le monde le savait déjà, et rien n’était réellement prévu initialement.

Jusque là, je pensais que j’aimais le farniente mais je découvre que ce vide et surtout cette incertitude m’angoisse.

Et mes petites angoisses existentielles, ce n’est rien. J’en ai bien conscience. J’ai des enfants qui courent sous mes fenêtres, j’ai la nature d’avril qui rend le paysage agréable, j’ai le Doubs qui renvoie ses reflets plein de soleil et les canards qui s’amusent et s’envolent dans l’air pur des petits matins calmes. Je suis une privilégiée et je vis avec quelqu’un que j’aime. Mon salaire est assuré et je n’ai pas de problème d’argent.

Mais ce huis-clos forcé n’est pas aussi doux pour tout le monde. Il y aura des traces psychologiques terribles à l’issu de cet enfermement - ce moment d’enfer - et les conséquences économiques et sociales seront épouvantables. Les indépendants, les petits commerces, les petites entreprises...Tout un tissu économique détruit.

Car rien n’est prévu. En Allemagne, l’Etat a débloqué 5000 € immédiatement pour les indépendants. Ici, économies de bouts de chandelle, quelques chanceux toucheront peut-être 1500 €, au prix d’un dossier aux contraintes absurdes, spécialité de notre administration tatillonne. Et quoi ? Une communication journalière à la télé et à la radio pour exhorter les petits patrons à s’endetter encore plus : reports de charges et emprunt (que souvent les banques n’accordent même pas). Gestion de petits bras qui ne veut surtout pas se mouiller. Les radins finissent toujours par payer les choses trois fois plus chers que tout le monde. C’est ce qui se passera, sauf que ce sera sans doute toi et moi qui allons payer les pots cassés. Tu paries ?

Rien n’est prévu. C’est une gestion à courte vue, une navigation dans le brouillard. Personne ne prend de décision, en fait. Encore heureux, nous ne sommes pas en guerre. Il faut des masques, des protections pour les soignants, là, pas des obus. Les choses sont pourtant claires, évidentes. Il faut des surblouses et vous savez ce que fait l’ARS ? L’Agence Régionale de Santé, c’est-à-dire l’antenne locale de l’Etat en matière de santé, envoie aux hôpitaux un tuto pour faire des surblouses en sac poubelle. C’est pas la misère, ça ? C’est pas la honte internationale ? Personne n’est donc capable, dans la 6e puissance mondiale, de lâcher du cash, de trouver un peu de monnaie pour que nos médecins ne ressemblent pas à des clodos et soient tout simplement équipés dignement, efficacement ? Sérieusement ?

Et au niveau local, c’est pareil. Personne pour prendre la décision de dépenser un peu d’argent pour fournir le matériel nécessaire aux maisons de retraite. Pendant ce temps là, les pompes funèbres n’ont plus assez de chênes pour les cercueils, les pages des journaux plus assez de places pour les avis de décès et nous n’avons plus assez de larmes pour pleurer.

Et pourtant, on sait maintenant précisément ce qu’il faut faire pour en finir : des masques efficaces pour tout le monde (pas en sopalin fabriqués par le club de macramé de la MJC, merci…) et des tests pour tout le monde. C’est la base, c’est l’évidence.

Y aura-t-il un tribunal national pour juger ces crimes contre l’humanité, à l’issue de ce cauchemar ?

Allez, abusez du chocolat, c'est bon pour le moral !





(et ça constipe, si vous êtes au bout du rouleau...de PQ...amis de la poésie...)


1 commentaire:

MHF a dit…

Bon week-end (quand même) à vous...
Vivement des jours meilleurs